De tous les sujets et récits abordés et "exploités" chez Vaillant, il est un thème qui a toujours fait l'unanimité, de manière presque caricaturalement contradictoire : le western ! Cette thématique sera développée dans le film, car elle correspond à un véritable phénomène culturel et sociologique de l'après-guerre (jusqu'au milieu des années 70)
Dans un illustré pourtant destiné dès le départ à la jeunesse "progressiste", issue du PCF (et de manière générale peu encline à une attitude complaisante vis-à-vis de tout ce qui vient des Etats-Unis...), le western sous toutes ses formes a été le genre-phare pendant plus de 3 décennies.
L'exotisme des grands espaces et des conflits qui se résolvent à coups de revolvers ont fait fantasmer des générations de lecteurs et de cinéphiles, particulièrement au lendemain de la Seconde Guerre. Une génération inondée d'un coup par le cinéma américain et ses mythes.
Parmi ces jeunes gens imprégnés par le western et la série noire américaine (y compris avant-guerre, avec la lecture des BDs américaines importées dans "Hop-là" et "Robinson", par exemple)), il y avait notamment Gerald Forton (né en 1931 ; petit-fils de Louis Forton) et Roger Lecureux (né en 1925, scénariste-vedette de Vaillant et l'un des futurs rédacteurs en chef de Pif-gadget - son personnage le plus célèbre étant Rahan).
Gerald Forton réside depuis 32 ans aux Etats-Unis.
Passionné de chevaux, il possédait un ranch dans le sud-ouest de la France, et aujourd'hui il lui arrive encore de participer à des démonstrations de rodéo en Californie...
Les lecteurs de Spirou se souviennent de ses bandes pour les "Histoires de l'Oncle Paul". Les lecteurs de Pilote gardent un souvenir nostalgique de son dessin pour Bob Morane.
Quelques amateurs de BD classique franco-belge savent qu'il a dessiné le premier tiers de l'album "L'affaire du collier" de la série Blake et Mortimer.
Ces 16 premières planches sont un étonnant compromis entre le style très pointilleux de Jacobs et la manière "américaine" de Forton, jusque dans les encrages.
Pour ceux qui auraient des doutes, il suffit de comparer les premières pages avec les dernières... ou de remarquer ci-dessous, avec la 1ère case de l'album, la manière élégante de dessiner les femmes... ce que semblait se refuser le créateur de Blake et Mortimer !
Les bédéphiles américains connaissent de lui ses collaborations à Marvel (Jonah Hex, ou le super-héros Black Lightning...).
Quelques réalisateurs américains ont conservé certains de ses storyboards pour des séquences de films (voir dans les liens, un peu plus loin)
Les anciens lecteurs de Vaillant puis Pif-gadget se rappellent de son style si "américain" pour des westerns et récits policiers, mais avant tout pour son "Teddy Ted", magnifique western réaliste qui renvoyait autant aux films de John Ford, Henry Hattaway ou Anthony Mann qu'aux débuts du western-spaghetti. Je ne suis pas le seul à penser que Teddy Ted, que Forton a dessiné pendant 11 ans, est son véritable chef d'oeuvre et la série qui lui est la plus proche (style, thèmes, souci du réalisme...). Si Blueberry est sans doute - en France - la référence absolue du western réaliste en BD, Teddy Ted restera peut-être "l'autre grand western en BD" méconnu, plus classique mais néanmoins passionnant.
Dans Pif-gadget, en 1975, lorsque la rédaction décide d'abandonner Teddy Ted - considéré comme appartenant trop au passé - Gerald Forton allait se voir proposer pendant une année l'adaptation de la célèbre série TV "les Mystères de l'Ouest"...
(ci-dessus à g. : la dernière planche du 1er "Teddy Ted" (scénario de Jacques Kamb, dessin de Hidalgo, alias Yves Roy) et à droite l'annonce du retour du Teddy Ted "new look", scénarisé par Lecureux et dessiné par Forton - en 1964)
J'ai eu l'occasion d'interviewer Gerald Forton à trois reprises, ce qui permettra d'aborder dans le film cet aspect très intéressant de la culture populaire "jeunesse", y compris dans Vaillant. Il m'a raconté la manière dont le western est arrivé pour les gens de sa génération, son travail avec Roger Lecureux, comment Vaillantétait perçu et aussi une anecdote sur l'un des très rares petits accrocs "idéologiques" avec la rédaction, sur une BD guerrière - alors qu'en fait on l'a toujours laissé totalement libre de s'exprimer graphiquement et proposer des récits inspirés de classiques américains dans ce journal communiste !
Et il a dessiné pour la caméra ce qu'il aime le plus au monde : les chevaux...
Le dernier tournage a eu lieu début décembre 2012, puis Gerald a repris l'avion. Le reverra-t-on en France ? A suivre...
Il y a 3 ans, j'avais réalisé un petit sujet vidéo sur Forton, mais l'ai retiré provisoirement, car d'une part il contient des images que je souhaite garder pour le film, et d'autre part je mettrai en ligne à la rentrée un sujet sur Teddy Ted, dont Gerald Forton vient de réaliser une nouvelle bande inédite, 35 ans après la fin de la série dans Pif-gadget...
Au passage, je tiens à remercier chaleureusement Gérard Boiron et toute sa famille pour leur accueil et pour la possibilité qui m'a été donnée grâce à eux de rencontrer et d'interviewer Gerald Forton (sans oublier la gastronomie angevine, qui est un autre sujet, trop long à développer ici ! haha). Merci également à Paul Leroux, à la librairie Amazonie BD, fan de Forton qui m'a permis de tourner en toute impunité dans sa librairie envahie d'aficionados en file indienne, leurs albums à dédicacer à la main...
Je renvoie aux sites ci-dessous pour en savoir plus sur la carrière phénoménale de Gerald Forton, et aussi sur Teddy Ted :
... et ne pas oublier la somme astronomique que représente le livre de Richard Medioni, "L'histoire complète 1901-1994", sur la saga de Vaillant, Pif et quelques autres, qui contient un chapitre sur Gerald Forton (auquel je ne suis pas peu fier d'avoir contribué).
Gerald Forton a appliqué son style très "américain"à l'un des personnages-phares de Vaillant : le journaliste enquêteur Jacques Flash. A comparer avec son "Bob Morane", qu'il dessinait en parallèle à la même époque.
Exercice toujours périlleux avec "Forton le taciturne" : l'interview devant une caméra !
Ici, en décembre 2012 devant quelques belles planches de Teddy Ted ou Bob Morane, après leur exposition au festival Angers BD.
Dans un illustré pourtant destiné dès le départ à la jeunesse "progressiste", issue du PCF (et de manière générale peu encline à une attitude complaisante vis-à-vis de tout ce qui vient des Etats-Unis...), le western sous toutes ses formes a été le genre-phare pendant plus de 3 décennies.
L'exotisme des grands espaces et des conflits qui se résolvent à coups de revolvers ont fait fantasmer des générations de lecteurs et de cinéphiles, particulièrement au lendemain de la Seconde Guerre. Une génération inondée d'un coup par le cinéma américain et ses mythes.
Parmi ces jeunes gens imprégnés par le western et la série noire américaine (y compris avant-guerre, avec la lecture des BDs américaines importées dans "Hop-là" et "Robinson", par exemple)), il y avait notamment Gerald Forton (né en 1931 ; petit-fils de Louis Forton) et Roger Lecureux (né en 1925, scénariste-vedette de Vaillant et l'un des futurs rédacteurs en chef de Pif-gadget - son personnage le plus célèbre étant Rahan).
(Gerald Forton et l'un de ses chevaux en Californie, 2007 image © Amélie Boiron) |
Passionné de chevaux, il possédait un ranch dans le sud-ouest de la France, et aujourd'hui il lui arrive encore de participer à des démonstrations de rodéo en Californie...
Les lecteurs de Spirou se souviennent de ses bandes pour les "Histoires de l'Oncle Paul". Les lecteurs de Pilote gardent un souvenir nostalgique de son dessin pour Bob Morane.
Quelques amateurs de BD classique franco-belge savent qu'il a dessiné le premier tiers de l'album "L'affaire du collier" de la série Blake et Mortimer.
Ces 16 premières planches sont un étonnant compromis entre le style très pointilleux de Jacobs et la manière "américaine" de Forton, jusque dans les encrages.
Pour ceux qui auraient des doutes, il suffit de comparer les premières pages avec les dernières... ou de remarquer ci-dessous, avec la 1ère case de l'album, la manière élégante de dessiner les femmes... ce que semblait se refuser le créateur de Blake et Mortimer !
Les bédéphiles américains connaissent de lui ses collaborations à Marvel (Jonah Hex, ou le super-héros Black Lightning...).
Quelques réalisateurs américains ont conservé certains de ses storyboards pour des séquences de films (voir dans les liens, un peu plus loin)
Les anciens lecteurs de Vaillant puis Pif-gadget se rappellent de son style si "américain" pour des westerns et récits policiers, mais avant tout pour son "Teddy Ted", magnifique western réaliste qui renvoyait autant aux films de John Ford, Henry Hattaway ou Anthony Mann qu'aux débuts du western-spaghetti. Je ne suis pas le seul à penser que Teddy Ted, que Forton a dessiné pendant 11 ans, est son véritable chef d'oeuvre et la série qui lui est la plus proche (style, thèmes, souci du réalisme...). Si Blueberry est sans doute - en France - la référence absolue du western réaliste en BD, Teddy Ted restera peut-être "l'autre grand western en BD" méconnu, plus classique mais néanmoins passionnant.
Dans Pif-gadget, en 1975, lorsque la rédaction décide d'abandonner Teddy Ted - considéré comme appartenant trop au passé - Gerald Forton allait se voir proposer pendant une année l'adaptation de la célèbre série TV "les Mystères de l'Ouest"...
(ci-dessus à g. : la dernière planche du 1er "Teddy Ted" (scénario de Jacques Kamb, dessin de Hidalgo, alias Yves Roy) et à droite l'annonce du retour du Teddy Ted "new look", scénarisé par Lecureux et dessiné par Forton - en 1964)
J'ai eu l'occasion d'interviewer Gerald Forton à trois reprises, ce qui permettra d'aborder dans le film cet aspect très intéressant de la culture populaire "jeunesse", y compris dans Vaillant. Il m'a raconté la manière dont le western est arrivé pour les gens de sa génération, son travail avec Roger Lecureux, comment Vaillantétait perçu et aussi une anecdote sur l'un des très rares petits accrocs "idéologiques" avec la rédaction, sur une BD guerrière - alors qu'en fait on l'a toujours laissé totalement libre de s'exprimer graphiquement et proposer des récits inspirés de classiques américains dans ce journal communiste !
Et il a dessiné pour la caméra ce qu'il aime le plus au monde : les chevaux...
Le dernier tournage a eu lieu début décembre 2012, puis Gerald a repris l'avion. Le reverra-t-on en France ? A suivre...
Il y a 3 ans, j'avais réalisé un petit sujet vidéo sur Forton, mais l'ai retiré provisoirement, car d'une part il contient des images que je souhaite garder pour le film, et d'autre part je mettrai en ligne à la rentrée un sujet sur Teddy Ted, dont Gerald Forton vient de réaliser une nouvelle bande inédite, 35 ans après la fin de la série dans Pif-gadget...
Au passage, je tiens à remercier chaleureusement Gérard Boiron et toute sa famille pour leur accueil et pour la possibilité qui m'a été donnée grâce à eux de rencontrer et d'interviewer Gerald Forton (sans oublier la gastronomie angevine, qui est un autre sujet, trop long à développer ici ! haha). Merci également à Paul Leroux, à la librairie Amazonie BD, fan de Forton qui m'a permis de tourner en toute impunité dans sa librairie envahie d'aficionados en file indienne, leurs albums à dédicacer à la main...
Je renvoie aux sites ci-dessous pour en savoir plus sur la carrière phénoménale de Gerald Forton, et aussi sur Teddy Ted :
Un site très complet sur Teddy Ted et son dessinateur
La 1ère version de Teddy Ted, par Kamb et Hidalgo, sur le DicentimBlog
La 1ère version de Teddy Ted, par Kamb et Hidalgo, sur le DicentimBlog
... et ne pas oublier la somme astronomique que représente le livre de Richard Medioni, "L'histoire complète 1901-1994", sur la saga de Vaillant, Pif et quelques autres, qui contient un chapitre sur Gerald Forton (auquel je ne suis pas peu fier d'avoir contribué).
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Débuts de Forton chez Vaillant en 1950, en même temps que Jean-Claude Forest : dans le premier "petit format" français : 34 Caméra (également baptisé au début "34 aventures") dans lequel ont démarré quelques pointures de la BD française, notamment J-Claude Forest et Paul Gillon !. On remarque immédiatement, ci-dessous, l'influence des BD américaines de l'époque, notamment celles dessinées par Milton Caniff.
Le "Red Ryder" de Fred Harman, créé avant-guerre, est l'une des références les plus souvent reconnues par Gerald Forton lui-même, quand il dessinait Teddy Ted. Il m'a raconté avoir apprécié le réalisme de l'ambiance de ce western, et le fait que le cow-boy n'y soit pas uniquement une figure mythique, mais un vrai "garçon-vacher" !
Gerald Forton a appliqué son style très "américain"à l'un des personnages-phares de Vaillant : le journaliste enquêteur Jacques Flash. A comparer avec son "Bob Morane", qu'il dessinait en parallèle à la même époque.
(Pour la petite histoire, certains récits étaient écrits par Georges Rieu, futur rédacteur en chef de Vaillant et créateur de la formule Pif-gadget...)
L'un des passe-temps de Forton, devant l'une de ses lectures d'enfance.
(photo prise en 2010). Il m'a d'ailleurs confié que selon lui, Robinson (qui ne contenait que des bandes américaines importées) a été un peu la matrice de la maquette de Vaillant, au niveau de sa composition et de l'agencement des séries qu'il contenait.
(photo prise en 2010). Il m'a d'ailleurs confié que selon lui, Robinson (qui ne contenait que des bandes américaines importées) a été un peu la matrice de la maquette de Vaillant, au niveau de sa composition et de l'agencement des séries qu'il contenait.
En 1973, Teddy Ted est l'un des rares personnages de Pif-gadget qui ait droit à son trimestriel. Dr Justice connaitra le même honneur ; Rahan sera le seul personnage à poursuivre l'aventure de la publication indépendante au-delà de Pif.
(Ci-dessus : case de démarrage "classique" pour Teddy Ted, dans le n.192 de Pif-gadget.
On sent le plaisir qu'éprouve Forton à dessiner l'arnachement du cheval.)
La reprise des "Mystères de l'Ouest" dans Pif-gadget en 1975 correspondait à une vague d'adaptations de séries à succès de la TV. Malheureusement les récits trop courts et aussi certaines mises en couleurs hasardeuses (par un stagiaire daltonien ??) ont sans doute peu fait pour qu'elle dure...
(ci-dessus une planche originale et sa parution en version "colorisée" dans Pif-gadget...)
Exercice toujours périlleux avec "Forton le taciturne" : l'interview devant une caméra !
Ici, en décembre 2012 devant quelques belles planches de Teddy Ted ou Bob Morane, après leur exposition au festival Angers BD.
35 ans après la fin de la série dans Pif-Gadget, Gerald Forton s'est amusé à réaliser un épisode inédit de Teddy Ted, comme un clin d'oeil au passé. Récit précédé d'une interview très intéressante par Louis Cance et Bertrand Pissavy-Yvernault.
Evénement rare : séance de dédicaces de Forton à Paris, dans la librairie "Amazonie BD".
Un public de lecteurs admiratifs, qui a l'impression (à juste titre !) de se retrouver devant un monument de la BD...
Au moins, les dédicaces de Forton valent le détour, surtout lorsqu'il croque Teddy Ted sur son cheval, par exemple.
:-)
Et pour finir : on n'oubliera pas que Gerald Forton est le petit-fils du créateur des Pieds-Nickelés ! Il a très peu connu son grand-père, disparu alors qu'il était enfant, mais il est resté attaché à ces personnages... qu'il est d'ailleurs en train de reprendre à son tour, pour des récits inédits. On verra le résultat dans les mois qui viennent... (photo prise en 2008)
Une photo très "lonesome cowboy" de Gerald Forton sur son cheval, face au désert du Mojave en Californie, prise en mars 2013 :